« Jérôme Bernard, 49 ans, 2 enfants, triple amputé à la suite d’un accident de tracteur à 9 ans, un peu touche à tout et surtout sportif ». C’est ainsi que se présente ce quadragénaire quand on lui demande de raconter son parcours pour Grand A.

Il commence par cet accident à l’âge de 9 ans sur l’exploitation familiale, qu’il résume ainsi : « au mauvais endroit au mauvais moment ». Quatre mois d’hospitalisation, amputé double tibia et bras droit et plus aucun souvenir de sa vie d’avant : « le cerveau est bien fait, pour moi je n’ai toujours eu que cette vie-là ». La seule chose qu’il sait c’est que le sport a toujours fait partie de lui.

Adapter ses prothèses pour vivre le sport

« On est en 1984, c’était la préhistoire en ce qui concerne l’acceptation de la société et le matériel existant.» À 18 ans il se met au vélo mais rien n’existait pour le grand public, alors avec son père et son frère, ils fabriquent eux-mêmes une pédale sur mesure pour Jérôme. Le vélo est adapté par les Cycles Andouard de Saint-Juéry, avec freins et vitesses à gauche. Avec des amis il fabrique aussi des pieds de ski pour fixer ses prothèses.

« Après l’arrivée de mes fils, j’ai trouvé dommage de ne pas pouvoir courir avec eux. J’ai acheté des lames pour courir et commandé l’emboîturage qui doit être fait sur mesure par un prothésiste. » Chaque lame coûte 5500€, l’emboîturage 5000€ de plus…

Rendre les lames de course plus accessibles

Avec Benjamin Trarieux, ingénieur chez Airbus, ils participent en 2021 au projet MIA de l’IMT-Mines Albi , sorte de speed dating entre étudiants et porteurs de projets. Sous la houlette d’Airbus, avec des chutes de rouleaux de carbone, ils réalisent des tests puis un prototype de lame de course : c’est la naissance de l’entreprise Hooper à InnoProd. L’entreprise Salomon leur fabrique une semelle interchangeable : route, piste, trail… unique et à prix raisonnable. Et avec Hooper, le prix des lames est divisé par deux !

Redonner confiance aux néo-amputés

« Beaucoup de néo-amputés se limitent, par méconnaissance. J’avais envie de montrer ce qui est faisable. » Jérôme crée son association Oz’Moov qui organise depuis 2021 des randonnées en montagne entre valides et amputés. Cette année c’était la Corse avec le GR20 : 4 étapes en 4 jours, 50 km, 3200 m de dénivelé positif, 27 participants dont 8 amputés, un prothésiste, un kiné et un infirmier. « L’idée c’est de sortir de sa zone de confort tout en restant serein. Apporter de la difficulté sans tomber dans l’échec ». Oz’Moov propose aussi de tester des lames gratuitement pendant 3 mois. « Mon but c’est que tous les gens amputés se remettent au sport, pas pour la performance mais pour la santé. Ce que je dis aux néo-amputés : la vie continue même si elle ne sera plus la même. Ta vie sera cool différemment . »

Son nouveau projet avec Oz’Moov : organiser des événements locaux pour rendre hommage à Hugo Allègre, cofondateur de l’association avec Jérôme, décédé au mois de mai à l’âge de 24 ans.

« Moi, mon bras et la flamme olympique »

Le 17 mai dernier, Jérôme a l’honneur de porter la flamme olympique lors de son passage à Revel.

« 200 mètres hyper émouvants car il y avait mes enfants, ma famille. Toutes les écoles étaient présentes, les gamins étaient stupéfaits de me voir passer : moi, mes 2 prothèses de jambe et mon seul bras tenant la flamme ! » Deux cent mètres qu’il a savourés : « C’est une fierté d’avoir été choisi, pour tout mon parcours de vie lié au sport, au handicap et aussi au monde associatif. »

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